La démission silencieuse au travail ou Quiet Quitting

Après la « grande démission », la « démission silencieuse » au travail se répand en France. Des salariés mécontents ne quittent plus leur emploi, mais se désengagent et se contentent du strict minimum. Quelles sont les manifestations et les causes du quiet quitting ? Quelles sont les conséquences du phénomène sur les entreprises et comment peuvent-elles prévenir une telle situation ?

Définition de la démission silencieuse ou Quiet Quitting

Au lendemain de la pandémie, les entreprises américaines ont vu partir chaque mois près de 4 millions de leurs salariés. Ce phénomène inédit baptisé « Big Quit » ou « grande démission » a débarqué en France, mais dans une moindre mesure. Aujourd’hui, c’est une autre tendance, également venue des États-Unis, qui se développe : la « démission silencieuse ».

Cette fois, les salariés ne démissionnent pas, mais se contentent de faire le strict minimum à leur poste actuel. Leur philosophie par rapport à leur vie professionnelle est simple : « Travaille à hauteur de ta rémunération (traduction de l’expression en anglais « act your wage ») ». Ou en d’autres termes, « fais ce pour quoi tu es payé, pas plus, et privilégie ta vie personnelle ». Des milliers de commentaires sont visibles sur internet sous le hashtag #quietquitting, et tous se rejoignent « Je fais juste le nécessaire pour éviter de me faire virer ou recevoir un avertissement », « je vise la médiocrité », etc.

Cette situation est la conséquence de changements d’état d’esprit consécutifs à la crise sanitaire : quête de sens au travail, besoin de flexibilité et d’un meilleur équilibre entre vie personnelle et vie professionnelle, revue des priorités…

Quelles sont les différentes formes de démission silencieuse ou Quiet Quitting

Quelles sont les différentes formes de quiet quitting ou démission silencieuse?

L’expression « démission silencieuse » couvre plusieurs réalités, ayant des conséquences différentes. Les formes les plus couramment observées sont :

  • une indifférence vis-à-vis de leurs missions et un manque d’implication au quotidien ;
  • un désinvestissement dans la vie sociale : présence physique réduite au bureau, peu ou pas d’interactions avec les collègues, absence aux activités sociales extra-professionnelles, cynisme… ;
  • une nette diminution du rythme de travail, ainsi que des performances et de la productivité ;
  • une multiplication des absences sans motif réel : prise de congés non planifiés, accumulation des absences pour de fausses excuses…

Les raisons qui poussent à la démission silencieuse ?

La démission silencieuse est généralement due à quatre situations qui génèrent un mal-être au travail :

  • Manque de motivation pour les tâches du quotidien, en raison de la perte de sens au travail, du manque de défis…
  • Manque de reconnaissance de la contribution individuelle, ou manque de perspective d’évolution professionnelle…
  • Relations interpersonnelles dégradées, avec des conflits fréquents, isolement, indifférence de la hiérarchie par rapport aux problèmes rencontrés…
  • Stress chronique, épuisement professionnel, voire burn-out, en raison du manque de ressources, d’une charge de travail excessive, d’une pression permanente…

Pour toutes ces raisons, le désengagement discret s’impose pour ces collaborateurs comme une façon de se protéger et de préserver leur santé mentale.

Quelle est l’ampleur du phénomène ?

Née aux États-Unis, où elle concerne la moitié des actifs, selon une enquête de Gallup, la démission silencieuse s’est répandue dans le monde entier, sous l’influence des réseaux sociaux. La France et l’Europe n’échappent pas au phénomène. D’ailleurs, selon le rapport mondial 2022 de Gallup concernant l’environnement de travail et la satisfaction des employés, l’Europe affiche le pourcentage de salariés les moins engagés parmi toutes les régions du monde. Le Royaume-Uni occupe la 33e place du classement européen (sur un total de 38 pays), avec seulement 9 % d’employés qui se disent investis ou stimulés dans leur emploi.

La tendance semble la plus marquée au sein de la génération Z, avec 82 % de sondés qui jugent « plutôt ou très intéressant » le fait de se contenter du strict minimum pour garder son emploi. Ce chiffre s’explique sans doute par le fait qu’ils accordent une très grande importance au sens du travail et à la flexibilité. Or, depuis la crise sanitaire, les jeunes de moins de 25 ans déplorent un manque accru de reconnaissance et la faiblesse des opportunités de développement. Une étude de Malakoff Humanis datant de juillet 2022 révèle que parmi les salariés de moins de 30 ans, 23 % souffrent d’une mauvaise santé mentale, soit 7 points au-dessus de la moyenne de l’ensemble des salariés.

Les conséquences de la démission lente pour les entreprises

Les impacts négatifs d’une démission silencieuse sur l’ensemble de l’organisation sont multiples.

Démotivation de toute l’équipe

Lorsqu’un salarié ne fait plus sa part du travail, refuse toute sollicitation additionnelle, même si celle-ci est rémunérée, et y compris en cas de pic inattendu d’activité, ses collègues risquent d’être tentés d’adopter la même attitude. L’entreprise se retrouve alors avec une équipe composée entière ou majoritairement de démissionnaires silencieux.

Perte de productivité

Avec des collaborateurs désengagés, la productivité et la rentabilité de l’organisation sont durement affectées. De plus, les dirigeants peuvent se retrouver dans l’obligation d’embaucher des personnes, à titre temporaire ou non, pour assurer la continuité normale de l’activité, ce qui représente des surcoûts non négligeables. En 2020, l’IBET estimait que le désengagement coûtait chaque année 14310 € par salarié aux entreprises.
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Des salariés qui ne se ressentent plus du bien-être dans l’entreprise sont susceptibles de la quitter pour une autre qui propose des conditions de travail plus conformes à leurs attentes et pouvant leur procurer de la satisfaction. Selon un sondage du cabinet Robert Half en 2023, 42 % des salariés ont besoin de trouver un sens à leur travail pour s’impliquer et se sentir épanouis. Alors que depuis quelques années, la guerre des talents fait rage, les organisations qui perdent leurs bons éléments sont fortement pénalisées, surtout si ces deniers possèdent des connaissances et expertises métiers rares ou très spécifiques, ou ont une longue ancienneté.

Dégradation de l’image employeur

Pour les candidats à l’embauche à l’heure actuelle, le bien-être au travail est un facteur clé de choix d’une entreprise et de fidélisation. Des salariés insatisfaits ne peuvent pas être des ambassadeurs de l’organisation à l’extérieur. La marque employeur de cette dernière en pâtit.

Comment prévenir la démission silencieuse en entreprise

Différents moyens de prévention de la démission silencieuse peuvent être mis en œuvre. Globalement, ces actions visent à améliorer les conditions de travail en tenant compte des nouvelles aspirations et des revendications des salariés, notamment ceux de la génération Z. Il est particulièrement important d’instaurer un climat propice au dialogue.

  • Être en permanence à l’affût des signaux précurseurs : baisse brutale ou progressive de la productivité, hausse des absences injustifiées, désengagement émotionnel…
  • Revoir la politique salariale et les avantages sociaux en signe de reconnaissance des efforts fournis par les collaborateurs, non seulement pour les aider à faire face à l’inflation, mais aussi pour construire des projets professionnels et personnels sur le long terme.
  • Organiser le travail de manière plus souple afin d’éviter la surcharge mentale et permettre un meilleur équilibre des temps de vie : télétravail au moins une journée par semaine, semaine de quatre jours, congés « flexibles », pas de réunion trop matinale ou trop tardive, pas de sollicitation en dehors des horaires de travail, pendant les week-ends ou les congés, etc.
  • Récompenser les performances et valoriser l’employé par la responsabilisation (contre rémunération) et l’ouverture d’opportunités d’évolution.
  • Donner un feedback régulier à chaque collaborateur concernant les domaines où il performe, ceux dans lesquels il peut s’améliorer, et les mesures concrètes permettant d’y parvenir.
  • Revoir les pratiques managériales afin d’accorder plus d’autonomie et de responsabilité aux salariés, car d’après des experts en management, le « mauvais » management augmente sensiblement le taux de « démissionnaires discrets ».
  • Favoriser la montée en compétences par la formation continue, et l’évolution des salariés en interne afin qu’ils puissent s’accomplir professionnellement.

Cependant, chaque entreprise a ses spécificités et les solutions sont tout aussi diverses. L’idéal serait de mener des enquêtes internes afin de comprendre les besoins réels de ses salariés. Ainsi, il sera possible d’y apporter une réponse objective et pertinente. Des professionnels peuvent accompagner les dirigeants, le service RH et les managers ou chefs d’équipes dans la mise en place de questionnaires ciblés et anonymes qui permettent de poser des questions «orientées solution» afin de prendre des mesures adaptées.

Les entretiens d’offboarding représentent également une source fiable d’informations pour identifier et prévenir les risques de démission et de démission silencieuse.

Le portage salarial, une solution pour se lancer en freelance

Quitter un poste salarié ou effectuer une reconversion professionnelle pour se lancer dans une activité indépendante attire de nombreuses personnes, mais la plupart redoutent la perte de la garantie de l’emploi. Il existe pourtant un régime à mi-chemin entre salariat et entrepreneuriat qui associe l’autonomie et la liberté du freelance à la sécurité, notamment la protection sociale, du salariat. Il s’agit du portage salarial.

Les avantages de la formule pour le salarié porté sont multiples :

  • Il n’a pas besoin de créer de structure juridique.
  • Il bénéficie d’une couverture sociale identique à celle de tous les salariés grâce à la signature d’un CDI ou d’un CDD : assurance maladie, indemnités journalières, mutuelle santé, cotisations retraite, assurance chômage, congés payés, formation professionnelle…
  • La société de portage s’occupe de toute la gestion administrative : facturation, recouvrement, déclarations sociale et fiscale…
  • Il choisit librement ses clients, ses missions, son lieu de travail et le montant de ses honoraires.
  • Il organise son travail à sa convenance, en fonction de ses impératifs professionnels et personnels.

Le portage salarial connait un franc succès depuis la pandémie, les indépendants ayant durement ressenti la précarité de leur situation, en particulier la faiblesse de leur protection sociale.

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